Calamity, une enfance de Martha Jane Cannary (Rémi Chayé)

Jeu de miroir
Calamity une enfance de Martha Jane Cannary est la nouvelle réalisation de Rémi Chayé, auteur du film Tout en haut du monde qui était présent dans la programmation CinéJeunes 2017-2018 « Décors et des corps ». L’histoire porte sur l’enfance de la légendaire Calamity Jane et son rapport en tant que femme dans le milieu patriarcale de sa communauté. Il est plus que conseillé de regarder Tout en haut du monde avant de se lancer dans cette nouvelle aventure, tant le film est une suite thématique de ce dernier. En effet, rappelez-vous, Tout en haut du monde raconte l’histoire de Sasha, jeune fille qui ne se plie pas aux règles de la société patriarcale de Russie. Elle décide de partir à la recherche de son grand-père perdu dans le nord afin de sauver l’honneur de sa famille. Deux destins, deux jeunes filles indépendantes partant dans une aventure reflétant leur parcours intérieur. Calamity Jane et Sasha sont deux enfants ne s’épanouissant jamais réellement dans leur quotidien. C’est pourquoi leur soif d’aventures les mène toutes les deux à se séparer de leur famille, afin d’accomplir un cheminement éminemment personnel. On pense tout autant à la quête de soi qu’au passage à l’âge adulte. Et à ce titre, le réalisateur réalise un jeu de miroir passionnant entre ces deux héroïnes.
Dans Tout en haut du monde, on remarque une amitié entre Sasha (personnage aux cheveux blonds) et une autre jeune fille (aux cheveux bruns). La première s’éloigne du patriarcat contrairement à la deuxième qui vit pleinement dedans. Vous l’aurez deviné en voyant le film, c’est exactement l’inverse qui se produit dans Calamity une enfance de Martha Jane. Une amitié tout aussi semblable se tisse entre Calamity (cheveux bruns) et Eve (cheveux blonds). Par ailleurs, cette dernière semble être un clin d’œil à Sasha tant elle dispose des mêmes traits physiques. A ceci s’ajoute sa première apparition, dans laquelle elle se retourne en direction des spectateurs, regard face caméra. Ceux ayant vu au préalable Tout en haut du monde ont pu s’interroger : est-ce le même personnage ? Eve est le personnage le plus bienveillant à l’égard de Calamity Jane durant toute son aventure, comme si elle n’était ni plus ni moins qu’un médium entre le public et les actes de Calamity.

Odyssée de Martha Jane
Trêves de divagations pour ceux et celles qui n’ont pas vu le précédent film de Rémi Chayé. Calamity une enfance de Martha Jane Cannary est beau, intelligent et même remarquable dans sa gestion du récit. L’animation proposé est certainement la plus contemplative de l’année 2020 avec celle du film Ailleurs de Gints Zilbalodis. On y décèle des influences toujours aussi présentes envers la peinture mais également dans le domaine vidéoludique. Comment ne pas songer aux vastes paysages épurés de Zelda Breath of the wild lors de certaines scènes de Calamity une enfance de Martha Jane Cannary ? Ces paysages sont par ailleurs très diversifiés même s’ils s’inscrivent dans le domaine du film de western. Ainsi paysage désertique, forêt, camp militaire, mine, cascade, chute d’eau et ville à l’aube d’or s’enchainent en fonction des péripéties du personnage principal. Quelques mots également sur le doublage. On apprécie grandement que les « célébrités » présentes à des fins promotionnelles dans le casting vocal du film ne doublent pas de personnages principaux et parviennent à s’effacer dans leur rôle telle qu’Alexandra Lamy. De plus, quelques pointures du doublage sont présentes à l’instar de Damien Witecka (connu pour être la voix française de Leonardo Dicaprio) et Alexis Tomassian (voix, entre autres, de Tobey Maguire, Justin Timberlake, Rami Malek…).
L’odyssée de Calamity Matha Jane Cannary embrase petits et grands qui se retrouveront probablement dans l’ensemble des thématiques abordées et au sein du flot continu de péripéties qui rythment le film. Comment ne pas rêver, en particulier cette année, d’une échappée sauvage en terre du Grand Ouest .

Julien BERVAS